Le cycle relocalise sa production
Les données les plus encourageantes du marché du cycle ? Certainement celles de la production des vélos dans l’Hexagone, dont la progression pour 2021 est estimée à +40 %.
L’assemblage de vélos se met à flot en France. Au printemps 2020, l’usine Seb de l’Is-sur-Tille (21) a délaissé ses casseroles pour la fabrication des smart bike Angell, du médiatique Marc Simoncini (fondateur du site de rencontres Meetic), dont le groupe est partenaire industriel. Reine bike, une nouvelle marque de vélos urbains à assistance électrique, a établi un partenariat technique et industriel avec Arcade cycles (La-Roche-sur-Yon, 85) pour lancer sa commercialisation en juillet prochain. En des temps pas si éloignés, les nouveaux vélos se concevaient en chambre avant d’en négocier la fabrication à Taïwan, la plaque tournante du cycle mondial. Les Gaulois de Moustache ont certainement ouvert une voie. Créée en 2010 par deux passionnés, la marque portait deux crédos : les vélos à assistance électrique (VAE) et la maîtrise de la fabrication. Onze années plus tard, le nouveau site de Thaon-les-Vosges (88) produit quotidiennement plus de 270 VAE et emploie plus de 150 personnes.
Flexibilité et valeur ajoutée
La relocalisation apporte flexibilité et réactivité aux unités d’assemblage. La valeur ajoutée fait le reste. « La valeur ajoutée sur un vélo à assistance électrique (VAE) est plus importante que sur un vélo traditionnel. Les assembleurs profitent de cette opportunité », a souligné Jérôme Valentin, président de l’UNION sport & cycle, lors de la remise des chiffres de l’observatoire du marché, le 8 avril dernier. Les entreprises d’assemblage nationales ont produit 660 690 vélos, dont 261 000 VAE. Moins de 20 % des vélos traditionnels sont assemblés en France, alors que quasiment la moitié des VAE sortent des lignes de montage hexagonales !
Le tout récent rapatriement d’une partie de la production d’O2 Feel dans le Nord, à Wambrechies, confirme cette tendance des marques de VAE à produire in situ. Et les sites « historiques » ne sont pas en reste. Le centre de compétence des vélos à assistance électrique du groupe européen Cycleurope se trouve à Romilly (10). La Manufacture française du cycle (MFC) produit annuellement quelque 450 000 vélos, dont plus de 900 000 VAE à Machecoul (44).
Les vélos à assistance électrique aiguillonnent la production
Renouvelée en 2019 pour 5 ans pour les vélos mécaniques et étendue aux vélos à assistance électrique, la taxe antidumping européenne protège l’industrie des vélos asiatiques à bas prix. Le développement des ventes des vélos à assistance électrique (VAE) fait le reste. Avec 514 672 unités commercialisées en 2020 (+ 29 %), le VAE représente désormais 19 % du marché en volume et 56 % en valeur. Chez nos voisins, le VAE constitue 50 % du marché aux Pays-Bas et en Belgique, 40 % en Allemagne. « Il n’y a aucune raison qu’en France, dans l’avenir, nous n’arrivions pas à ce taux de pénétration des VAE sur notre marché », s’enthousiasme Jérôme Valentin, estimant le potentiel entre 1 et 1,5 million de vélos d’ici 2025 et plus de 2,5 millions d’ici 2030. Ces projections appellent au développement de nouvelles unités de production et à la mise en place d’une filière solide. Pour l’année 2021, les industriels gagent déjà sur une croissance de 40 % de leur production.
Un hub industriel national
L’inclinaison des usagers au made in France et l’augmentation constante du prix moyen d’achat depuis une dizaine d’années abondent la création d’une filière cycle. L’exemple de la région d’Agueda, au Portugal, donne des idées. L’implantation d’une usine de cadres a amené dans son giron d’autres industries. Un vrai hub industriel a été créé. Est-ce possible en France ?
Une filière industrielle ne peut se construire sans l’aide des pouvoirs publics, rappellent à l’encan les acteurs du cycle. Pour preuve ? La commercialisation de plus d’un million de pièces et accessoires en 2020 (+20 % par rapport à 2019) doit largement être placée à l’actif du Coup de pouce réparation vélo et ses 1,9 million d’interventions. En 2017, année du bonus à l’achat d’un VAE de l’État sans conditions, le volume des ventes avait augmenté de 89 % pour retomber à 22 % l’année suivante. Gageons que la récente avancée pour que l’acquisition d’un vélo devienne éligible à la prime à la reconversion automobile (projet de loi climat et résilience) permette de retrouver ces trajectoires ascendantes. À suivre.