Une histoire de plus de trente ans
Le vélo n'est qu'embryonnaire dans les politiques publiques de transport en France, lorsque dix communes décident de bâtir un réseau de villes cyclables, en 1989.
En octobre 1988, la première rencontre nationale des villes cyclables est organisée à Bordeaux, sous l'impulsion d'élus locaux. Quelques mois plus tard, en janvier 1989, dix villes pionnières créent le Club des villes cyclables : Arès (33), Bordeaux (33), Chambéry (73), Franconville (95), Lorient (56), Mérignac (33), Saumur (49), Strasbourg (67), Quéven (56), Toulouse (31). Cinq organismes se joignent à la création : le CAUE 33 (Conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement de la Gironde), l'ADTS, le Cetur (Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques) devenu Certu puis Cerema, la chambre syndicale du cycle (le syndicat de la profession), la FUBicy (devenue FUB). L’initiative provient d’élu.e.s en charge des transports au Gart (Groupement des autorités responsables de transport). Le groupement, fondé en 1980, héberge le tout jeune Club et joue le rôle d’incubateur. L’union prévaut autour de la nécessité de changer les politiques publiques de transport.
Alors que l’automobile constitue pratiquement le seul horizon en matière de déplacements, des élus et des techniciens territoriaux portent une alternative avec le vélo, convaincus de la nécessité de transformer les politiques publiques de transport. La notion de chaîne de déplacements date de ces années. Face aux chiffres tragiques de la sécurité routière des années 1980, de nouvelles expériences de modération de la circulation émergent mais peinent à se déployer, à l'image des zones 30 introduites dans le code de la route (1990) ou de la limitation de la vitesse en ville à 50 km/h. Les centres-villes restent un territoire automobile. Les élus locaux se heurtent aux frondes des commerçants prônant le tout voiture, à l’unisson autour de la formule « no car, no business ». Les actions du Club des villes cyclables pour un partage de la voirie aboutissent au premier décret de la « démarche du code de la rue », en 2008. La même année, le Club change sa dénomination sociale et s’adjoint le terme de « territoires », correspondant davantage au périmètre des structures intercommunales fédérées.
Dans les années 1990, le vélo reste absent des textes officiels. Pourtant, son retour en grâce dans les centres-villes montre quelques signes avant-coureurs, prémices à l’instauration des vélos en libre-service dans les années 2000. Votée le 30 décembre 1996, alors que le vélo prêtait encore à sourire, la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie (Laure) marque une avancée importante avec deux dispositions majeures. L’une, d’application générale sur la restriction programmée du trafic automobile, concerne les grandes villes avec l’obligation de mise en place de plans de déplacement urbains (PDU). L’autre, applicable à toutes les communes quelles que soient leurs tailles, porte sur l’obligation de création d’itinéraires cyclables lors de toute réalisation ou rénovation de voirie. Les associations d'usagers s'appuyèrent sur l'article 20 de la Laure pour aider au développement des infrastructures cyclables.
Dès le début des années 2000, les bénéfices sanitaires du vélo et des mobilités actives au quotidien ne sont plus à prouver. Les études se multiplient. La santé pointe l'automobile du doigt. Le rapport « Transport, environnement et santé » de l’Organisation mondiale de la santé suggère de laisser la voiture plus souvent au garage et de se déplacer à pied ou à vélo. En 2005, sous le titre "Bien à vélo, bien dans ma peau", le 16ème congrès du Club des villes cyclables donne la parole au député de Paris Jean-Marie Le Guen, médecin spécialiste de santé publique, qui venait de publier Obésité, le nouveau mal français (Armand Colin). La voix sanitaire commence à se faire entendre.
Les vélos en libre-service font changer le vélo d’échelle. La mise en place des vélos à la carte rennais en 1998, précurseurs du Vélo’v lyonnais (2005) puis du Vélib’ parisien (2007), marque un tournant. L’accélération des aménagements ne se fait plus attendre. Le vélo prouve qu’il n’est pas dangereux et gagne de nouveaux publics. Les collectivités territoriales, rassemblées au sein d’un Club des villes et territoires cyclables grandissant, placent encore davantage le vélo dans la continuité des transports publics, comme en témoigne la Rencontre du Club de mars 2007, annoncée sous le titre : « Vélo + transports publics = une combinaison gagnante ».
Le vélo à assistance électrique accélère l'histoire. À la première édition du Salon de la mobilité parisien en 2004, un vélo à assistance électrique (VAE) trône en vedette sur le stand du Club. Le VAE symbolise l’innovation dans les transports. Toutefois la porte peine à s’ouvrir, ses tarifs élevés et son écosystème encore fragile ralentissent son éclosion. Il faut attendre la fin des années 2000, en France, pour que le VAE sorte de l'anonymat puis devienne un phénomène de mobilité active dix années plus tard. En 2010, le Club lance l’Observatoire des mobilités actives pour mener sa première enquête sur le vélo dans les agglomérations dotées de plans de déplacements urbains.
La création du Club des parlementaires pour le vélo le 5 juillet 2012, à l’occasion de l’assemblée générale du Club (organisée au Sénat), devenu Club des élus nationaux pour le vélo, donne une nouvelle place au vélo dans les textes et projets législatifs. La transition écologique place le vélo sur le devant de la scène. Le Club des villes et territoires cyclables se fait entendre lors des grandes échéances électorales, rappelant que les collectivités locales assurent l’essentiel de l’effort public en faveur des mobilités actives.
Le vélo reconnu au niveau de l'État. Les élu.e.s membres du Club des villes et territoires cyclables ont participé à l'élaboration de la loi d’orientation des mobilités (LOM), publiée le 24 décembre 2019 à la suite du Plan vélo & mobilités actives du 14 septembre 2018. Cette loi-cadre marque un tournant institutionnel en positionnant le vélo comme mode de déplacement à part entière, vertueux pour la santé et l’environnement. En 2020, la crise sanitaire du Covid-19 s'est suivie d'une mobilisation sans précédent autour du vélo. Le Club est missionné dès le mois d’avril par le ministère de la Transition écologique et solidaire pour faciliter la mise en place d'aménagements cyclables de transition après le confinement sur tous les territoires.
Le Club affirme sa prise en compte de la marche. L’assemblée générale du Club du 10 décembre 2021 a introduit la marche dans la raison sociale de l’association qui devient le Club des villes et territoires cyclables et marchables. L'intégration de la marche dans la raison sociale du Club correspond à une réalité pour les collectivités adhérentes : limiter l’usage de la voiture individuelle en renforçant l’usage des modes actifs et faire cohabiter l’ensemble des modes de déplacement dans un espace public pacifié. Un sujet saillant pour le Club depuis de nombreuses années avec mobilisation, dès 2006, pour l’instauration d’un Code de la rue jusqu’à sa traduction réglementaire entre 2008 et 2014.
Le récit des 30 années du Club, une série réalisée pour l'année du trentenaire en 2019 :
2 Les préoccupations sanitaires
3 Libres services et assistance electrique
Retrouvez la vidéo de l'anniversaire des 30 ans du Club, projetée lors du congrès de Nantes, en octobre 2019 :